Histoire Officielle des Guerres de Greyhawk
par David "Zeb" Cook
traduit par L. Debelle
Introduction
Les philosophes disent que
les conflits trouvent toujours leur origine dans la convoitise - du pouvoir
ou de butins. Ceci est peut-être vrai pour les quelques petites guerres
et autres raids frontaliers qui firent l'histoire de Taer. Toutefois, le grand
carnage qui marqua ces dernières années ne saurait s'expliquer
simplement par la seule convoitise. En effet, ce furent plutôt l'alchémie
complexe des passions mortelles conjuguée aux points faibles de quelques
pays et à la démence de certains qui précipitèrent
des nations les unes contre les autres dans des guerres qui finalement reforgèrent
le visage de la Flanesse.
Ainsi, pour bien comprendre les Guerres de Greyhawk, comme on les nomme, il faut
avant tout, connaitre la distribution des personnages qui écrivirent cette
page douloureuse de l'histoire de Taer. Ceux-ci vont de demi-dieux à des
laissés pour compte, de guerriers héroïques à des espions
encapuchonnés de rouge. Ensemble, ils constituent une grande dramatis
personae, la distribution d'une terrible tragédie.
Dramatis Personae
Iuz le Vieux
"Sa Plus Profane Eminence, Seigneur de la Douleur, Démon du Nord,
Fils du Mal, Maître des Redoutables et Abominables Présences, Iuz
le Mal, Iuz le Vieux", ainsi était acclamé ce répugnant
demi-dieu par les créatures mauvaises et corrompues qui le servaient. Reignant
de la noire sang Dorakaa, la Cité des Crânes, Iuz avait toujours
arboré un désir non dissimilé de dominer toute la Flanesse.
Toutefois, il ne se fit remarqué qu'un siècle avant les Guerres
de Greyhawk.
En 479 année commune (AC), les terres connues maintenant sous le nom de
Iuz étaient constituées d'un ensemble de petits fiefs indépendants
dont les "princes" régnant se les disputaient âprement pour en hériter
de Furyondy, qui à cette époque s'étendait très loin
vers le nord. Parmi ceux-ci, il y avait un despote misérable dans les Collines
Hurlantes qui mourrut dans l'année et laissa sa terre à un fils
d'origine douteuse - Iuz. Bizarrement, les rumeurs décrivaient tantôt
ce "fils" comme un vieil homme, tantôt comme un démon de plus de
deux mètres.
Après avoir réorganisé son petit domaine en un véritable
camp militaire, Iuz porta son attention sur les fiefs voisins. Feignant une tactique
purement défensive, il travailla dans l'ombre pour monter ses rivaux les
uns contre les autres. Ainsi, quand ceux-ci eurent fini d'épuiser leurs
ressources et leurs énergies dans des conflits inutiles, il frappa. A la
fin de cette première année sur le trone, Iuz avait conquis les
trois fiefs entourant le sien.
Grâce à son utilisation extensive de troupes humanoïdes, le
domaine de Iuz commença à s'étendre rapidement comme la pourriture
sur une pêche trop mure. En effet, la plupart des princes humains considéraient
les orques et les gobelins comme des vermines inférieures, une attitude
personnifiée par celle de son Eminence le Comte Vordav qui jura de "brûler
à vue tous les taudis de ces misérables crasses"
1.
Bien que cette attitude permettait à ceux-ci de "maintenir un faux
semblant de pureté par de vieilles traditions aerdiennes"
2,
elle impliquait aussi que leurs armées seraient rapidement débordées
par celles de Iuz qui utilisait à fond la cruauté et la fécondité
des orques.
Comme de plus en plus de fiefs tombaient aux mains des humanoïdes, un flot
grossissant de réfugiés rapportait des histoires folles de la puissance
de Iuz jusque dans le sud, à Furyondy. D'après ces rumeurs, Iuz
aurait constrit une route pavée de crânes entre les Collines Hurlantes
et Doraaka, sa nouvelle capitale. Les lanternes des tours gardant cette route
seraient alimentées par de la graisse humaine. Iuz lui-même aurait
mué et quitté sa forme de vieillard pour celle d'un colosse de taille
gigantesque - tout du moins c'est ce que la rumeur disait. Bien que la plupart
des histoires fantaisistes racontées purent être infirmées
de visu par la suite, il n'en reste pas moins que celles-ci se propagèrent
comme une trainée de poudre le long des côtes sud du Lac Whyestil
semant la panique sur leur chemin
3. Le roi Avras
III de Furyondy fut donc amené à tourner son attention vers sa frontière
nord afin d'empêcher l'expansion des forces de Iuz jusqu'au coeur de ses
terres
4.
La position du roi Avras était alors fragile à cause de l'indépendance
de ses nobles - particulièrement les Grands Seigneurs du sud qui n'étaient
pas menacés par Iuz. En effet, la plupart de ceux-ci saisirent cette opportunité
pour obtenir des consessions de la part de leur roi, le privant ainsi de taxes
dont il aurait bientôt cruellement besoin
5.
De telles concessions provoquèrent la colère des barons de la frontière
nord du pays qui se sentaient trahis par les grands du sud. Réagissant,
ceux-ci infiltrèrent l'Ordre du Cerf, une petite faction religieuse à
cette époque, et patiemment, la transformèrent en une confrérie
militaire loyale envers eux.
Ainsi, la menace externe de
Iuz ébranla Furyondy de l'intérieur. Vers 505 AC, trois parties
coexistaient au sein de la noblesse. La plus puissante faction était
celle des Grands Seigneurs du Sud, qui utilisaient la menace de Iuz pour affranchir
leurs terres de l'influence royale. En deuxième venait l'Ordre du Cerf
dont l'unité et la force augmentant venait s'opposer aux raids frontaliers
de Iuz. En dernier venait le roi Avras III avec ses domaine et sa famille. Ses
terres coincées entre celles de plus puissants, le roi essayait très
futilement d'appaiser les esprits de tous.
A ce point critique toutefois, la puissance grandissante de Iuz fut mise à
rude épreuve. Que ce soit par le fait du hazard, par sagesse ou par courage,
nul ne le sait, toujours est-il qu'un petit groupe d'aventuriers réussit
à approcher Iuz et à l'emprisonner sous les tours du Chateau Greyhawk.
Comment et pourquoi ils le firent restent un mystère - ainsi que leurs
noms, excepté un : le Mage Zagyg le Fou
6.
Quelques furent les motivations
ou les buts des aventuriers, leur action eut pour conséquence le sauvetage
de Furyondy. Privés de leur seigneur, les armées gobelines et
orques qui se massaient aux frontières du pays se désagrégèrent
rapidement. Les créatures barbares combattirent les régents de
Iuz et conquirent pour eux les terres à l'est et à l'ouest du
Lac Whyestil. Ceux de l'est fondèrent la Société Cornue
vers 513 AC avec l'aide d'humains peu scrupuleux alors que les profondeurs de
la Forêt de Vesve restèrent sauvages jusqu'aux Guerres de Greyhawk
près d'un demi-siècle plus tard.
Bien que les tribus humanoïdes se soient retirées de ses frontières,
Furyondy était trop divisé pour pouvoir donner la chasse. Comme
la pression venant du nord n'existait plus, le Prince Belvor III, fils de Avras,
courtisa assiduement l'Ordre du Cerf et réussit à le rallier à
sa cause. Puis, après la mort de son père, il usa de ses royales
prérogatives pour ramener ceux du sud dans le rang. Bien que son règne
fut relativement court
7, la coalition de Belvor
III lui survécut, continuant à rassembler les diverses factions
rivales pendant les quelques années de régence qui suivirent sa
mort.
Depuis qu'il est monté sur le trône à la suite du Seigneur
Throstin, Régent du Royaume, le roi Belvor IV s'est employé à
renforcer Furyondy, allant même jusqu'à programmer la conquête
de la Société Cornue et des Terres de Iuz. Toutefois, les problèmes
de relations au sein de son royaume sont loin d'être résolus. En
effet, les factions rivales, quoique moins puissantes, existent toujours. Le Seigneur
Throstin, par exemple, a raffermi son emprise sur l'Ordre du Cerf et contrebalance
le poids politique du du jeune roi. Des luttes d'influence existent donc toujours
à Furyondy.
Ainsi, quand Iuz réapparut en 570 AC, Belvor IV n'y prêta pas attention
trop occupé qu'il était à unifier son royaume. De plus, Iuz
se fit discret. En effet, son départ soudain ayant laissé un désordre
total dans ses terres, il devait remettre vite de l'ordre dans ses affaires et
réaffirmer son authorité sur ses tribus humanoïdes béliqueuses.
L'Empereur Fou
Avant que le conflit Iuz - Furyondy ne commence son long cheminement, des évènements
d'égale importance eurent lieu dans l'est. Dans le palais de Rauxès
au coeur du Grand Royaume, des rejetons de la Maison de Naelax se répendaient
dans les halls, abattant sauvagement jusqu'au dernier tous les membres de la Maison
de Rax, alors reignante. Arrivée au pouvoir par traîtrise et les
mains tachées de sang, il était écrit que la Maison de Rax
reignerait par la terreur, car la folie coulait dans les veines de sa nombreuse
progéniture
8.
L'histoire du Grand Royaume des Aerdiens commence environ 40 ans avant l'avènement
de Iuz. En ces jours, la Province du Nord était dirigée par le Prince
Ivid, un noble capable et charismatique quoique complètement débauché.
Parce que des décades de règne molasson avaient usé la crédibilité
de la maison impériale, des nobles tels que le Prince Ivid devenaient de
plus exigeants dans leurs revendications et mettaient la pression sur le Trône
de Malachite. La royauté, faible qu'elle était, se refusait à
toutes celles-ci et le Grand Royaume plongea dans le Tumulte entre les Couronnes.
Quand Nalif, le dernier héritier de Rax fut assassiné 9, une nuée
de princes rivaux clamèrent leurs droits au Trône de Malachite. Grâce
à une grande campagne de diplomacie, de guerres et d'assassinats, le Prince
Ivid résolut le problème de la succession en éliminant tout
autre prétendant, le laissant ainsi seul prince de sang survivant. La Maison
de Naelax monta donc sur le trône et le Prince Ivid devint Sa Céleste
Trancendence, Empereur de Aerdy, le Grand Prince Ivid. Parmi ses autres titres,
il y avait aussi Herzog de la Province du Nord, Archiduc d'Ahlissa, Idee et Sunndi,
Suzerain de Medegia, Commandeur de la Marche des Os et Protecteur de Almor et
Onnwal.
Le chaos qui suivit l'assassinat de Nalif ne cessa pas quand Ivid se saisit du
trône. En effet, les paysans de Onnwal, Idee et Sunndi se rebellèrent
et le Herzog d'Ahlissa revendiqua sa propre indépendance
10.
Ivid se dépécha de s'occuper de son cousin du sud (les nobles du
Grand Royaume était tous de la même famille) pour trouver en fin
de compte son pays épuisé et mal organisé après des
années de guerre civile. Incapable de lever une armée suffisante
à partir de ses propres fiefs, l'Empereur dût, à contre coeur,
faire appel à l'aide des quelques cousins qu'il lui restait. Ceux-ci répondirent
à l'appel avec la diligence de requins sentant le sang et s'apprêtant
à faire un festin de leur très cher Empereur apparemment affaibli.
L'histoire de cette seconde vague de guerres civiles est encore plus confuse et
incomplète que la première. Le saccage de l'Université de
Rauxes en 449 AC détruisit tous les rapports impériaux de la guerre
11. De la même manière la considérable
bibliothèque du Duc Astrin à Eastfair fut détruite et brulée
pendant la campagne impériale finale. Bien que quelques histoires plus
ou moins complètes aient survécues dans les monastères de
Médegia, ils sont très grandement marqués de la philosophie
dégénérée du Saint Censeur. Leur exactitude est donc
très douteuse, particulièrement en ce qui concerne leur principal
sujet : les batailles entre Rauxes et Médegia.
Bien que des récits corrects de ces batailles se soient perdus, les résultats
de ces guerres sont clairs : l'Empereur garda son trône mais souffrit des
pertes de territoires et d'influence. Un neveu qu'Ivid avait installé à
la tête de la Province du Nord se rebella contre son oncle et décréta
son fief état souverain. De même, le prélat en chef de l'empire
d'Ivid - le Saint Censeur de Médegia - défia l'empereur et établit
un siège épiscopal indépendant. Les Barons des Mers n'eurent
pas autant de succès. Bien qu'ils prirent le contrôle de la flotte
aerdienne, l'Empereur leur fit fermer l'accès à tout port. Laissés
ainsi sans un seul point de chute qui leur soit favorablement disposé,
les Barons des Mers durent chercher la paix avec Ivid.
On ne sait que peu de chose des campagnes qui eurent lieu au coeur du Grand Royaume,
sinon qu'Ivid y gagna son titre de "parlant aux démons". Quand
Almor se rebella, l'Empereur contre-attaqua avec violence démontrant toutes
ses affinités avec les démons. En s'appuyant sur une aide infernale,
les armées impériales défirent les rebelles. Malgré
l'état d'affaiblissement de l'empire, Almor ne put supporter la furie diabolique
de la Garde Compagnionne 12 avant que Nyrond envoie de l'aide. Finalement, les
armées almoriennes épuisées durent replier en bon ordre jusqu'aux
frontières actuelles de la Prélature.
Depuis cette époque, le Grand Royaume a connu divers empereurs. Ivid reigna
pendant 48 ans et, bien qu'il n'ait jamais réussi à regagner le
contrôle des provinces qu'il avait perdues, il réussit tout de même
à rassembler le reste des Aerdis à sa cause soit par la peur qu'il
inspirait soit par l'appât du gain. Son fils, Ivid II, ne survécut
que trois ans sur le trône. En effet, instable déjà avant
son couron-nement, Ivid II sombra rapidement dans une démence ravageuse
après son accession aux attributs du pouvoir
13.
Ce ne fut pas la folie qui causa la perte d'Ivid II. En effet, il fut tué
par un de ses fils qui désirait la couronne. Ivid III suivit immédiatement
l'exemple de son grand père, exterminant tout candidat possible à
la couronne. Ses mains encore souillées du sang de son père, il
emprisonna ses enfants dans des prisons dorées, mais leur fournit des tuteurs
et de nombreuses débauches; sinon il aurait pu passer pour un père
négligeant. Quand son âge fut avancé, Ivid III déclara
que l'enfant qui lui survivrait lui succéderait. Cette annonce déclencha
un véritable bain de sang et une succession de fratricides dans la prison
de velours de ses enfants. Le seul survivant devint Ivid IV.
Le nouveau dirigeant d'Aerdy imita son père : ses enfants qui ne furent
pas tués à la naissance furent emprisonnés et leurs mères
atrocement torturées pour le plus grand amusement de l'Empereur. La gorge
de leur père hors de portée, les enfants d'Ivid IV pratiquèrent
leurs boucheries naelaxiennes sur une succession de nurses et de gouvernantes.
Certaines survivantes vinrent à l'attention de l'Empereur pour leur plus
grand malheur et rejoignirent son harem personnel pour disparaitre ensuite dans
les boyaux des donjons de ses bourreaux. L'Empereur préférait la
souffrance bien plus que l'amour.
Outre ceci, le reigne d'Ivid IV accomplit peu. L'Empereur se réjouissait
en orgies et autres luxures, pas en administration. Il lançait annuellement
des campagnes militaires pour reprendre Almor ou Nyrond et qui ne résultaient
qu'en une modification des frontières de quelques miles dans un sens ou
dans l'autre. Peu importait, les batailles procurait à l'Empereur un spectacle
estival. En effet, il était plus intéressé par le déchaînement
de la bataille que par un réel gain militaire.
Alors que Ivid IV badinait, son futur successeur, Ivid V, était au travail.
Deuxième parmi les fils de l'Empereur, Ivid V s'occupait de simplifier
la désignation d'un successeur en exterminant tous ses semblables
14.
Bien qu'Ivid accomplit cette tâche avec talent et tact, son père
refusa de lui céder le trône. Ainsi, il loua les services de la plus
ancienne des favorites de son père pour lui verser de l'acide dans l'oreille
15.
Ivid V monta donc sur le trône et l'occupe depuis 28 ans. Bien qu'il soit
un commandant d'armée peu efficace car indiscipliné, il gouverne
cependant son pays d'une main de fer démontrant un véritable génie
pour tout ce qui est machinations politiques. Indéniable-ment, toutes les
campagnes militaires qu'il a entreprises se sont soldées par un désastre,
mais sa folie n'a aucunement atténué ses talents diplomatiques.
Une fois de plus, les Provinces du Nord et du Sud se sont ralliées à
la bannière de l'Empereur et ses émissaires ont même réussi
à rapprocher les humanoïdes de la Marche des Os de la cause de l'empire.
Sa force grandissante, l'Empereur n'attend plus qu'une excuse pour reformuler
ses exigeances aux pays rebelles de l'ouest.
Le Père de l'Obéissance
Le troisième et peut être le plus important des personnages intervenant
dans cette guerre tragique est aussi sans nul doute le plus mystérieux.
Connu seulement par son titre - Sa Sérénité Sans Egal, le
Père de l'Obéissance - le chef de ligne de la Confrérie Ecarlate
construisit intentionnellement un voile de secrets et de rumeurs au sujet de ses
suivants et de lui-même. Ainsi, actuellement, tout ce qu'on sait d'eux n'est
que pure spéculation
16.
Bien que cette organisation d'humains suelois soit certainement très ancienne
17, la Confrérie Ecarlate ne fit véritablement
parler d'elle qu'en 573 AC
18. Cette année
vit aussi la disparition du Prince de Furyondy, Prévost de Véluna.
La coïncidence de ces évènements semble d'une importance particulièrement
significative pour les théoriciens des conspirations qui voient la main
de la Confrérie Ecarlate en toute chose bizarre ou inexpliquée
19.
Qu'il existe une connection ou non entre les deux, la Confrérie est restée
muette à ce propos.
Il est évident que ceux de la Confrérie Ecarlate forment un peuple
fanatique. Leur société extrèmement monastique leur a d'ailleurs
valu le titre de "moines", bien qu'on ne sache rien de leurs pratiques
religieuses. Ils considèrent toutes les autres races comme inférieures
au peuple Suel, et mettent ces croyances à exécution avec une méchanceté
méthodique et glaciale. Malgré une discrétion et une malveillance
sans faille envers leurs inférieurs, les membres de la Confrérie
Ecarlate semblent obéir à leur chef - le Père de L'Obéissance
- jusqu'à la mort.
Bien que de vagues rumeurs de son existance aient circulées depuis des
siècles, la première action officielle de la Confrérie Ecarlate
fut l'envoi d'émissaires dans les cours de la Ligue de Fer en 573 AC. Voyageant
encapuchonnés de rouge, ces étrangers prétendaient être
les ambassadeurs de la Terre de Pureté. La plupart étaient d'excellents
érudits et sages qui observaient les cours de la Ligue offrant généreusement
leur aide à ceux qui en avaient besoin. Ainsi, ils réussirent patiemment
à faire leur chemin dans les cours de nombreux nobles des pays du sud jusqu'à
des postes sensibles, parfois vitaux. Pendant que les sages en rouge devenaient
les confidants de rois, des assassins de la secte infiltraient leurs entourages
sous des déguisements plus subtils. L'époque où cette invasion
silencieuse commença véritablement reste inconnue, ainsi que le
nombre d'assassins impliqués. Certains se révélèrent
avant la guerre, renforçant la cause de la Confrérie par meurtres
et terreurs. Malgré ces frappes ponctuelles, l'étendue du rôle
de la Confrérie reste incertain : les assassins disent rarement qui ils
sont quand ils frappent. La tuile tombée du toit et qui tua le Chambellan
de la Principauté d'Ulek fut - elle détachée par un assassin
ou par hazard ?
20
Des autres activités de la Confrérie avant la guerre, il n'existe
que des rumeurs. Dans les dernières années avant la guerre, des
rapports provenant du sud de la Flanesse suggérèrent que des mystiques
en rouge réduisaient en esclavage les vastes empires sauvages de l'Hepmonaland.
Des voyageurs décrivaient ces sauvages dans des termes les plus horribles,
détaillant sans pitié tous les usages de leurs rites cruels
21.
D'après les histoires des voyageurs, de vastes nations suivant toujours
les anciens usages suelois se préparaient à la guerre dans les jardins
humides de l'Hepmonaland.
Toutefois, cette terre était bien trop loin des frontières des royaumes
civilisés de la Flanesse pour que quiconque ne s'en préoccupe. Les
histoires de ces vagabonds tombèrent donc dans l'oreille d'un sourd, et
personne ne prèta attention au filet grandissant des sages en rouge. Si
quelqu'un s'y était intéressé, d'innombrables vies auraient
pu être sauvées.
Déroulement de la Guerre
Etant donné la délicate balance du bien et du mal sur la
Flanesse et la tragiquement faible nature des tyrans et rois, la question
n'était pas de savoir si une guerre allait éclater mais
comment, quand et où elle le ferait. En 582 AC, ces questions trouvèrent
des réponses surprenantes.
Levée de Stonefist
Dans le nord glacé, loin de la lutte pour la puissance des anciens royaumes
d'Aerdi, vivaient quelques tribus barbares : les Fruztii, Schnai et Cruski et
les pillards du Domaine de Stonefist. Pendant des siècles, ces bandes
attaquèrent quiconque entrant sur leurs terres stériles ou sur
leurs mers. Trois des quatre groupes - Frutzii, Schnai et Cruski - clamaient
avoir des racines sueloises et des ennemis communs dont le principal était
ceux de Stonefist.
Les escarmouches entre ces peuples primitifs demeurèrent une parenthèse
dans l'histoire épique de la Flanesse. Toutefois, des rumeurs surgirent
à propos d'un ancien artéfact ancestral - les Cinq Lames de Corusk
- d'origine barbare et doté d'une puissance magique extraordinaire perdue
depuis des siècles. Quatre des cinq lames furent retrouvées au
coeur des Montagnes Corusk. Et quand la dernière des lames serait unie
à ses soeurs et rituel approprié fait, les Cinq Lames de Corusk
uniraient leur puissance pour invoquer le Grand Dieu du Nord. Cet être
surnaturel léverait alors les tribus barbares et les mènerait
à la victoire dans les chaudes et fertiles terres du sud.
Bien que d'innombrables jeunes guerriers moururent dans les montagnes à
sa recherche, la dernière lame ne fut pas retrouvée. Quoiqu'il
en soit, en 582 AC, un chef d'une grande puissance et très charismatique
apparut parmi les barbares. Il s'appellait Vatun, Grand Dieu du Nord - et avait
la puissance magique recquise pour le prouver. L'apparition de Vatun surprit
même les plus convaincus de la légende des Cinq Lames, y compris
les rois barbares qui avaient utilisé cette histoire pour asseoir leurs
pouvoirs. Vatun dût d'une certaine manière prouver sa puissance
à ces dirigeants sceptiques, car les rois Fruztii, Schnai et Cruski livrèrent
leurs souverainetés ancestrales au "tout puissant" Vatun.
En réalité, Vatun n'était pas ce qu'il semblait être;
l'histoire entière n'était qu'une gigantesque imposture. Iuz,
avec sa ruse maligne et ses pouvoirs de demi-dieu, avait fabriqué Vatun
et masquaradait comme le messie des barbares. Peut-être que les Cinq Lames
de Corusk existaient réellement et peut-être que le Grand Dieu
du Nord serait apparu si la cinquième lame avait été retrouvée,
mais les machinations de Iuz stoppèrent net toute recherche de cette
dernière.
Vatun ne perdit pas de temps. La guerre était imminante entre les barbares
et Stonefist. Alors que Vatun apparaissait devant ses suivants barbares subjugués,
les Fists convergèrent vers eux pour interrompre la cérémonie.
Lors de la brève bataille qui s'ensuivit, Vatun repoussa facilement les
Fists et reçut ainsi les louanges prostrés des barbares. Toutefois,
plutôt que d'écraser complètement les Fists, Vatun s'en
fit des alliés. En l'espace de quelques semaines, Sevvord Barberouge
- très connu pour son indépendance bornée - changea radicalement
(ou magiquement) d'idée et se joignit aux hordes barbares de Vatun.
Les Vagabonds des Terres Stériles, peut-être parce qu'ils sentaient
l'odeur trop familière de Iuz, se montrèrent moins pieux envers
Vatun. Terriblement indépendants, les chefs des quelques Chiens de Guerre
survivants refusèrent l'offre de Vatun de s'allier à lui. En se
retirant dans la grande plaine entre Stonefist et Iuz, les Vagabonds furent
ensuite à la fois protégés et assaillis par leurs terres
gelées et inhospitalières.
Bien que Vatun semblait inconséquant aux sages des terres civilisées
et qu'il fut en réalité une feinte, son apparition altéra
irrémédiablement la délicale balance du bien et du mal.
L'alter ego de Iuz tenait les tribus du nord dans une main de fer et d'un simple
geste, il les envoya au sud.
Le Domaine de Stonefist, maintenant allié plutôt qu'ennemi des
barbares, se massa en vue d'un assaut vers le sud. Faisant preuve d'une sauvagerie
qui surpassa sa réputation, Sevvord Barberouge, Maître du Domaine,
réprima dans le sang toute opposition à son reigne. Il fit même
du Rite Annuel des Batailles un véritable massacre pour prouver son authorité,
puis rassembla ses forces pour un conseil de guerre. Il dit que le temps était
venu pour les Fists, privés de leurs terres et gloires, d'amener leurs
voisisn du sud de se rendre à leurs évidences.
Grâce à une telle démagogie, le Maître du Domaine
n'eut pas de mal à rassembler une énorme et loyale armée
barbare. Les Fists étaient avides de guerre et Sevvord Barberouge disposé
à les laisser se repaitre. Sur ordres de Vatun, le Maître du Domaine
mena son armée au travers de la Passe du Tonnerre et déferla sur
Calbut dans le Duché de Tenh.
Chute de Tenh
Pendant des décades, les atamans de Stonefist avaient convoitées
le Duché de Tenh - une terre chaude et douce selon leurs standards barbares.
Toutefois, pendant toutes ses années le Duc de Tenh et ses armées
avaient bloqué le chemin vers ces terres riches. Basées dans la
cité murée de Calbut
22, les patrouilles
du Duc Ehyeh surveillaient et protégeaient la Passe de Tonnerre, repoussant
les petites attaques et ralentissant des raids plus importants suffisament pour
que des renforts provenant de la garnison de la ville puissent arriver. Pendant
des siècles, les cités murées de Tenh et leurs garnisons
contraignirent les Fists à de petits raids frontaliers. Préoccupés
par des escarmouches quasi-continuelles avec les Fruztii, les Fists n'avaient
pas monté d'attaques de grande envergure à travers la passe depuis
plus de 30 ans.
Pendant ces années, les Tenhas devinrent suffisants. Croyant la frontière
nord comme sure, le Duc Ehyeh retira de ses guerriers de la Passe du Tonnerre
pour leur assigner des tâches plus urgentes : patrouilles pour intercepter
les créatures venant des Montagnes Griff et des Marais des Trolls, forces
de frappe pour chasser les hors-la-loi de Rookroost et des Royaumes Bandits,
et armées régulières pour renforcer la frontière
avec la Théocratie de Pale qui devenait de plus en plus dangereuse. La
Passe du Tonnerre étant calme et les Fists occupés ailleurs, Ehyeh
permit à la garde des Tenhas basée à Calbut de s'endormir
dangereusement.
En 582 AC, Calbut n'était pas du tout préparée pour résister
à une horde de barbares frachissant la Passe du Tonnerre. Le grand mur
de la gorge qui fermait les hauteurs de la passe tomba sous les assauts des
Fists et les courriers portant la nouvelle de l'attaque furent rattrapés.
L'interminable flot des Fists s'engouffra ensuite dans la passe, lécha
les murailles de Calbut et s'introduisit dans ses portes encore ouvertes prenant
le commandant de la garnison totalement au dépourvu
23.
Tous les hommes de la ville furent massacrés et les femmes et enfants
emmenés en captivité. Bien que la perte de Calbut toucha le Duc
de Tenh, il s'attendait à ce que l'invasion suive son cours normal, c'est-à-dire
à ce que les Fists s'arrètent pour piller la ville. Pendant les
jours - voir les semaines - durant lesquelles les barbares pilleraient la cité,
le Duc Ehyeh lèverait prudemment son armée puis piégerait
ceux-ci dans leurs camps. Lentement, le Duc rassembla son armée, prélevant
des troupes sur d'autres fronts.
Toutefois, cette invasion ne se passa pas comme les précédantes.
Pendant que les forces de Tenh se rassemblaient, Sevvord Barberouge poussa ses
troupes encore en avant. Dans la brève campagne qui s'ensuivit, les Fists
marchèrent le long de la rivière Zumker, venant aisément
à bouts des quelques milices qu'ils trouvèrent sur leurs chemins.
Cinq jours après la chute de Calbut, la horde de Sevvord assiégeait
la capitale de Tenh, Nevond Nevnend.
Sans la présence rassurante du Duc, les citoyens paniquèrent.
Des rumeurs de greniers vides virent la levée d'une foule de paysans
effrayés qui marchèrent sur la citadelle. En réponse, le
Conseil des Seigneurs lacha la garde de la citadelle sur la foule, ce qui provoqua
une émeute qui s'étendit rapidement à toute la ville. Pendant
que la cité bouillonnait, à l'extérieur, Sevvord faisait
la siège. Ainsi, la capitale tomba facilement, et avec elle toute l'authorité
de Tenh.
Après le double désastre de Calbut et de Nevond Nevnend, les armées
de Tenh étaient décimées. Les Fists de Sevvord se répendirent
alors facilement à travers les campagnes et dans le Phoswood. Le Duc
et la Duchesse, ainsi que leurs enfants, fuirent le pays, trouvant refuge à
la cours de la Comtesse Belissica de Urnst.
Diplomacie
La nouvelle de la chute de Tenh se répendit comme une trainée
de poudre, provoquant des réactions de tous les cotés. La conquête
de Sevvord sonna comme un glas à travers la lande. Des messagers murmuraient
les nouvelles aux oreilles des rois et empereurs leur disant "Le marteau
est tombé. Le temps est venu.". La grande guerre avait fait couler
son premier sang.
Le plus déconfit par la chute de ce marteau était le Duc Ehyeh.
A la cité de Radigast, lui et ses courtisans fondèrent une cours
en exil. La décision de la guerre de Tenh s'était faite vite,
ainsi, la réputation du duc en pâtit considérablement. On
l'accusa de négligeance, d'inaptitude à commander, etc... C'est
dans ce contexte que la Duc demanda à sa bienfaitrice des fonds et une
armée pour recouvrir sa terre. La comtesse de Urnst, n'étant pas
femme à outrepasser les traditions ancestrales des droits de la noblesse,
donna refuge au duc et à sa suite et finança même sa cours,
mais elle se refusa à toute autre aide.
D'autres nations ne furent pas si obligeantes. La Théocratie de Pale,
bien que mécontente de voir Sevvord à ses portes, avait depuis
longtemps une très faible confiance envers ceux de Tenh. Ainsi, Le Prélat
Suprême de Pale refusa de fournir une armée au Duc Ehyeh, choisissant
plutôt de renforcer ses propres frontières et de s'apprêter
à conquérir Tenh lui-même. Le roi de Nyrond, quoique favorable
à la cause du Duc, réserva ses troupes et ses finances pour contrer
les troupes de son vieux rival, le Grand Royaume, qui ne devraient plus tarder
à se manifester.
Au même moment, Iuz subissait son premier revers. Les peuples des Fruztii,
Cruski et des Schnai, rivaux de longue date des Fists, ne furent pas heureux
de l'attaque audacieuse de Sevvord. Tenh avait toujours aidé les barbares
dans leur lutte contre le Grand Royaume et la Marche des Os. Par exemple, le
Duc Ehyeh fermait les yeux sur le commerce d'armes entre Rookroost et Krakenheim
qui passait par ses terres. Maintenant, le Maître du Domaine fermait les
routes commerciales et confisquait toutes les expéditions d'armes pour
les donner à son peuple. Furieux de ce manque à gagner et se sentant
trahis par le "Grand Dieu du Nord", les chefs barbares commencèrent
à douter de Vatun. L'alliance que Iuz avait construite commençait
à s'éroder.
Les rois barbares refusèrent d'écouter Vatun quand celui-ci leur
demanda d'écraser Ratik et d'envahir la Marche des Os. Bien que les humanoïdes
de la Marche comptaient parmi leurs ennemis les plus détestés,
ils n'avaient aucune envie d'aggresser Ratik. La minuscule archibaronie avait
coopéré avec eux depuis de longues années et des liens
forts s'étaient créés entre elle et ceux du Nord
24.
Bien que n'ayant rien contre des raids côtiers contre la Marche des Os
et le Grand Royaume, les barbares refusèrent les ordres de Vatun d'attaquer
Ratik. Après quelques mois de guerre, l'alliance du nord s'effondra.
Ainsi, la ruse qui avait déclenché la grande guerre pris fin,
mais pas sans que Iuz ne se soit assuré de la fidélité
sans faille des Fists. Toutefois, bien que ses plans ne se soient pas vraiment
déroulés comme il l'avait prévu, Iuz avait tout de même
réussi à détourner l'attention des barbares vers l'est.
En effet, au lieu de franchir les passes du nord et de se déployer vers
le sud, les hommes du nord lachèrent de grands raids maritimes le long
des côtes du Grand Royaume quelque temps après.
Martyres du Saint Bouclier
En 583 AC, Iuz retourna dans son domaine. Sa courte absense, le temps pour lui
de s'occuper des barbares, menaçait une fois de plus de plonger son empire
dans le chaos le plus total. Enervé par les revers qu'il avait suivit
dans l'est et déterminé à établir le calme chez
lui, Iuz restructura sauvagement sa nation. Les nobles humains des vieilles
maisons de Furyondy - déchets humains, trop faibles pour s'opposer à
Iuz ou fuire - furent soit déposés soit tués. A leur place,
Iuz placa des êtres vils venus de l'Abysse : nabassu, cambions, hezrou,
mariliths ou vrocks qu'il avait d'une façon ou d'une autre réussi
à mettre à son service
25.
Iuz ne s'arrêta toutefois pas à son domaine, et replaça
aussi les chefs de la Société Cornue. Les Redoutables et Abominables
Présences, les Hiérarches, lui rendirent la tâche facile.
En effet, ils reignaient en secret cachant leurs traits humains à leurs
suivants humanoïdes. Ainsi, des rumeurs comme quoi ils étaient des
Seigneurs Démons circulaient parmi leurs hommes, celles-ci ayant été
créées par les Hiérarches pour asseoir leurs pouvoirs.
Iuz décida simplement de faire de ces rumeurs une réalité.
Au mois de Coldeven, à la culmination du Festival de la Lune Rouge, les
citadelles de Molag rougirent de sang comme le Seigneur du Mal frappa. En moins
d'une nuit, les Hiérarches devinrent des êtres légendaires
et Iuz pris totalement le contrôle de la Société Cornue.
Cette prise de pouvoir et l'armement de Iuz pour la guerre ne passèrent
pas inaperçus. Les espions de Furyondy revinrent au roi Belvor IV avec
des nouvelles d'armées humanoïdes grossissantes, et celles-ci auraient
pu être écrites avec leurs propres sangs car la plupart de ses
agents humains furent retrouvés morts, rendant Belvor aveugle et sourd
à ce qui se tramait au delà de ses frontières nord.
Quand les hommes qui échappèrent aux massacres arrivèrent
à lui, le roi se prépara immédiatement à se défendre,
d'autant plus qu'il venait juste d'apprendre le destin tragique de Tenh. Les
citadelles le long de la rivière Veng furent renforcées en vue
d'une attaque imminente. Les vassaux de Belvor levèrent des milices et
dépéchèrent des troupes le long de la Veng. Des émissaires
allèrent dans les Terres Boucliers et Veluna pour les inciter à
la guerre. Belvor était déterminé à ce que Furyondy
ne tombe pas.
Dans les Terres Boucliers, les émissaires de Belvor reçurent un
accueil glacial de la part du Seigneur Holmer, Comte de Walworth et Commandeur
des Chevaliers du Saint Bouclier. Les relations entre les deux dirigeants avaient
toujours été délicates. Bien qu'allié ostensiblement
à Furyondy, le comte suspectait depuis longtemps que Belvor projetait
d'annexer les Terres Boucliers. Aussi, les nouvelles de la levée de Molag
rendirent Holmer d'autant plus prudent. Toutefois, il ne pris pas cette mise
en garde à la légère mais pensa plutôt que Belvor
donnait plus d'importance au danger qu'il n'y en avait vraiment. Holmer pensait
plus périlleux pour lui d'accepter sur son sol de puissants Chevaliers
de Furyondy pour l'aider à se défendre plutôt que d'affronter
les hordes de la Société Cornue avec ses propres troupes.
Au début du mois de Flocktime, Iuz frappa. Sous le couvert de la nuit,
les humanoïdes de la Société Cornue passèrent les
rivières Veng et Ritensa et lancèrent des attaques tests. Aucune
de celles-ci ne fit de pertes réelles parmi les chevaliers du Cerf ou
du Saint Bouclier, mais toutefois elles atteignirent leurs buts. Pendant que
Belvor et Holmer se concentraient sur l'état de leurs frontières
fluviales, les véritables légions de Iuz franchissaient la Ritensa
bien au nord des Terres Boucliers et frappaient au coeur des Royaumes Bandits.
Les seigneurs brigands furent rapidement dépassés par la puissance
militaire déployée par Iuz. De plus, étant donné
le nombre d'espions récemment exécutés, le demi-dieu était
quasiment sûr que Belvor et Holmer n'étaient pas au courant de
cette mavoeuvre.
Effectivement, ils ne l'étaient pas. Le seigneur Holmer n'eut vent des
actes de Iuz qu'après que les armées de celui-ci aient brisé
sa frontière est et alors qu'elles marchaient sur Critwall. A cette annonce,
Holmer retira de sa frontière fluviale toutes ses troupes sauf une poignée
de chevaliers et mena lui-même la marche de son armée vers sa capitale
sans défense, Admundfort. Plus de la moitié de ses chevaliers
périrent pendant ce voyage, mais ceux qui atteignirent les rives du Nyr
Dyv brulèrent autant de vaisseaux que possible puis prirent la mer vers
la capitale. Toutefois, cette manoeuvre désespérée fut
vaine car celle-ci tomba rapidement sous les coups de boutoirs des poursuivants.
Ainsi, Critwall et Admundfort tombèrent aux mains griffues de Iuz et
Holmer fut capturé.
La chute des Terres Boucliers découvrit le flanc est de Furyondy; ce
que Belvor répara rapidement. Ses seigneurs levèrent de vastes
milices pour renforcer les rangs des Chevaliers du Cerf et des troupes furent
rapidement rappelées de la frontière avec la Forêt de Vesve.
Grâce à ces renforts, l'armée de Furyondy réussit
à contenir les hordes humanoïdes de Iuz à la Bataille du
Pont de Critwall leur infligeant des pertes sévères, interdisant
ainsi toute progression au delà de la Veng.
Attaques et Contre-attaques
Bien que pris au dépourvu, Furyondy n'était pas endormi. Pendant
qu'il levait des troupes fraiches, le roi Belvor IV fit envoyer ses émissaires
les plus capables dans les cours du sud. Des ambassadeurs apportèrent
la triste nouvelle de la chute d'Holmer à Célène, Bissel,
Veluna, dans les Etats d'Ulek et par dessus tout à Kéoland. Avec
tact, ils mirent en garde ces pays sur les conséquences que pourrait
avoir la chute des pays du nord, incitant ces pays à se soulever et à
s'opposer au mal une bonne fois pour toute. Toutefois ces mots furent presque
vains; en effet, les dirigeants demandèrent combien de troupes ils devaient
envoyer et combien de temps ils pouvaient attendre avant de le faire.
Pendant ce temps dans l'est, Archbold III de Nyrond se remettait du choc de
la chute de Tenh. Agacé par des accusations comme quoi il aurait laissé
tomber le Duc, il décida de prouver de façon indéniable
son soutien à ses anciennes colonnies. Alarmé par des rapports
relatant le pillage sans merci auquel les Fists s'adonnait, Archbold marcha
au nord à travers le Nutherwood. Les contingents elfes de son armée
lui permirent d'infiltrer facilement le Phostwood et de défaire les quelques
barbares postés là. Sans autre forme de procès, les Nyrondais
débouchèrent de la forêt.
Différents qu'ils étaient des Tenhas, les Fists s'avérèrent
des adversaires coriaces. Fou de rage par cette attaque surprise, Sevvord exécuta
quelques commandants laxistes comme exemples, puis sacrifia quelques uns de
ses hommes pour lui laisser le temps de rassembler ses forces près du
Village de Ternsmay. Bien que désavantagés par le nombre, les
Fists occupaient un terrain favorable, c'est pourquoi, aucun camp n'eut le dessus.
Après un combat qui dura tard dans la nuit
26,
les Fists se replièrent et fortifièrent leurs positions. Toutefois,
Archbold ne pouvait plus se permettre de pousser plus loin. Ainsi, pendant de
longues semaines les deux adversaires campèrent sur leurs positions s'observant
à travers un no-man's-land d'une mile.
Iuz n'avait aucune intention de laisser sa suite de victoires s'interrompre.
Utilisant l'or pillé dans les Terres Boucliers, il acheta les services
de mercenaires humanoïdes de la Forêt de Vesve
27.
L'armée mercenaire descendit de la Vesve, débordant la garde frontalière
de Furyondy et prenant Crockport. Le chemin de Chendl, la capitale était
libre. Toutefois, elle ne tomba pas grâce à la réaction
rapide de quelques chevaliers et des gens de Highfolk qui harassèrent
l'armée humanoïde tout au long de sa progression dans les terres
de Furyondy. Ainsi, bien que l'armée marchait sur Chendl, elle le fesait
lentement, ce qui donna du temps aux défenseurs de la cité pour
se préparer. Toutefois, au mois de Reaping, Chendl était encerclée.
Furyondy assiégé
Les nouvelles de Chendl portèrent un coup à Belvor IV. Iuz tenait
les Terres Boucliers, la Société Cornue ne cessait d'attaquer
ses frontières, et maintenant la province de Fairwain et Chendl étaient
assiégées.
Pire peut-être, aucune aide n'était arrivée. Les rapports
de ses ambassadeurs étaient décourageants. Le Seigneur Kendall
écrivait de Célène disant que sa Majesté, Yolande,
était "très ambigüe quand il lui demandait combien de
troupes elle pouvait envoyer et quand elle pensait s'en occuper". Les nouvelles
de Bissel n'étaient pas meilleures. Le Margrave pensait que les Cavaliers
de Ket profiteraient du départ de ses troupes pour attaquer sa frontière.
Le Commandant de Gran March insistait sur le fait qu'il ne pouvait agir sans
concertation préalable avec Kéoland. Et Kéoland restait
muet.
A Furyondy, les Sept Familles Nobles com-mençaient à critiquer
le coût de la guerre. En plus des revenus engagés, elles se lamentaient
aussi sur leurs pertes de revenus. Les nouvelles milices avaient vidé
les campagnes d'hommes jeunes et valides, laissant les moissons pourrir sur
place. Pendant ce temps, les agents de Iuz s'infiltraient dans le royaume essayant
de pousser la population locale affamée à la révolte. Toutefois,
Belvor ne se découragea pas là où tout autre aurait cru
la cause entendue.
En effet, toutes les nouvelles n'étaient pas si mauvaises. Les chevaliers
avaient réussi à stopper l'avance des humanoïdes qui ne pouvaient
alors faire guère plus qu'encercler Chendl. Les raids de la Société
Cornue devenaient de moins en moins fréquents et plus brouillons. Mais,
mieux que tout, le Canon de Veluna venait de lui apprendre que son armée
se dépêchait de se porter au coté de Furyondy. De même,
les nouvelles de Nyrond - quoique moins bonnes - indiquaient clairement que
les Fists étaient contenus. Encouragé par ces nouvelles, Belvor
décida de passer à l'action.
La première attaque de Furyondy - plus politique que stratégique
- fut de briser le siège de Chendl. Jouant sur la nature chaotique des
assiégeants
28, Belvor laissa la majorité de ses troupes
le long de la Veng et, à la tête d'unités d'élite,
il mena lui-même une attaque fulgurante contre ceux qui menaçaient
sa capitale. Les chevaliers de Belvor étaient en sous nombre, mais grâce
à leur tactique supérieure et à l'aide de sorciers, ils
prirent le dessus. Les chevaliers taillèrent en pièces les rangs
humanoïdes et les acculèrent aux murs de la ville. Peu de temps
plus tard, les champs autour de Chendl étaient couverts de cadavres orques
séchant au soleil, et la route de Chendl était à nouveau
libre.
A ce moment, Iuz et Furyondy étaient aux bords de leurs limites. La guerre
violente qu'ils s'étaient livrée avait épuisée leurs
réserves en nourriture et en troupes entrainées. Ainsi, pendant
les mois de Patchwall, Ready'reat et Sunsebb, les deux nations se dépéchèrent
de se réapprovisionner.
L'éveil du Grand Royaume
A ce point, le conflit qui allait devenir la Grande Guerre de Greyhawk n'était
perçu par beaucoup comme une simple dispute régionale - quoique
particulièrement violente - entre quelques nations du nord. Les états
de la Ligue de Fer et ceux autour de Kéoland ne voyaient pas pourquoi
ils devraient envoyer de l'aide aux pays assiégés ni pourquoi
ils devraient fortifier leurs propres frontières. Ils avaient bien tord.
Que ce fût par pure folie ou par intérêt politique, toujours
est-il que c'est au mois de Patchwall 583 que l'Empereur du Grand Royaume se
décida à faire son apparition dans l'arène de la guerre.
Celà faisait bien longtemps qu'il convoitait Almor et Nyrond, mais ces
deux nations s'étaient toujours montrées unies contre ses légions.
Toutefois, les récents évènements de Tenh étaient
une parfaite diversion pour Nyrond : le roi Archbold et la moitié de
son armée étaient loin au nord. Le reste de ses troupes, bien
que loin d'être inoffensives, ne pourraient pas lutter contre les siennes
avec un rapport de deux contre un en leur défaveur.
D'autres facteurs encore convincurent Ivid V que Nyrond et Almor étaient
près à être conquis. Il y avait quelques temps que l'Empereur
courtisait les humanoïdes de la Marche des Os, et ces tribus aggressives
et primitives venaient juste de répondre favorablement à sa proposition
d'alliance après qu'il leur eut promis une bonne part du butin qu'ils
pilleraient ensemble plus tard. A cette nouvelle, Ivid prépara la guerre
dans ses propres terres et inscita ses cousins rebelles et indisciplinés
à faire de même. La Province du Nord, sentant le vent tourner,
se rallia à la cause de l'Empereur
29, pensant
qu'Ivid, s'il n'était pas un ami sur, serait très certainement
un ennemi des plus affreux. La Province du Sud hésita, craignant un sale
coup suite à ses échecs contre Onnwal. L'Episcopat de Médegia
se montra défiant envers Ivid, confiant qu'était le Saint Censeur
qu'il pourrait tenir l'Empereur à distance. Bien qu'Ivid ne fut pas vraiment
ravi par ce refus, il ne prit toutefois aucune mesure contre son prélat
en chef
30. Afin d'augmenter encore plus les rangs
de ses troupes, Ivid plongea dans ses coffres et dépensa des sommes collossales
pour acquérir les services de nombreux mercenaires. Des nouvelles de
ces largesses allèrent bien au delà de la Cité de Greyhawk
et les rangs des armées de Nyrond et Furyondy se trouvèrent amenuisés
comme des mercenaires partaient vers l'est pour y trouver une paye plus intéressante.
Avec ses armées gigantesques et hétéroclites, Ivid frappa
dans toutes les directions à la fois. Son armée des Glorioles
passa la Rivière Thelly et entra dans les Glorioles. Après y avoir
rencontré une vive résistance, celle-ci pénétra
toutefois dans le Comté de Sunndi et le déborba rapidement. L'Armée
d'Aerdy, pour sa part, marcha lentement vers Chathold, capitale d'Almor. L'Armée
du Nord, quant à elle, entra dans la Forêt d'Adri près de
Edge Field avec comme but Innspa à Nyrond. Pendant ce temps, la Grande
Armée de Champ de la Province du Sud marchait à travers les Collines
de Fer avec la ferme intention de capturer enfin la Cité Libre d'Irongate.
Le Raid d'Osson
Les intentions du Grand Royaume pouvaient difficilement passer inaperçues.
En effet, ayant toujours été la cible numéro un d'Ivid
et sachant quel sort l'Empereur réserverait à son pays, le Prélat
Kevont d'Almor avait lui-même organisé un réseau de renseignements
au sein des terres d'Aerdy afin de ne jamais être pris au dépourvu
par les décisions du Fou de Rauxes. Ainsi, quand ses espions lui apprirent
qu'Ivid levait d'immenses armées, il envoya des messagers à Nyrond
et dans tous les étas de la Ligue de Fer pour les préparer à
la guerre pendant que son peuple consolidait ses propres défenses.
Prudent qu'il était, Kevont ne prit pas lui-même le commandement
de ses troupes mais le confia plutôt à un chevalier jeune et respecté
de tous, l'Honorable Osson de Chathold qui fut alors placé à la
tête de la totalité des forces de la Prélature.
Osson n'eut pas de mal à se faire une idée de la gravité
de la situation. Rien que par le nombre, le Grand Royaume était en mesure
d'écraser le pays - et visiblement avait l'intention de le faire. La
situation était claire, mais la solution ne l'était pas. Almor
ne pouvait pas se défendre contre une telle armée. Ainsi, Osson
décida de passer à l'offensive et de porter la guerre au delà
de ses frontières au coeur même du Grand Royaume épargnant
ainsi Almor. Ce plan audacieux n'aurait jamais été mis à
exécution si Kevont lui-même ne l'avait appuyé, car nombre
de vieux chevaliers le trouvaient bien trop dangereux.
Le plan était très simple et osé. Osson divisait son armée
en deux. Il en postait une partie le long de la frontière avec le Grand
Royaume. Celle-ci, trop petite pour bloquer une attaque massive, avait pour
rôle de harceler sans cesse les troupes d'Aerdy et de patrouiller la frontière
avec rigueur et énergie. Ainsi, pensait Osson, les aerdiens pourraient
croire qu'elle serait bien plus importante qu'en réalité, ce qui
devrait les empêcher d'attaquer Almor en masse
31.
La deuxième partie de l'armée d'Almor était constituée
de la totalité de la cavalerie du pays et commandée par Osson.
Tout bagage était interdit hormis le strict nécessaire
32.
Osson ordonna que chacun renonce à tout confort inutile, car faible par
le nombre, la vitesse de sa troupe ferait certainement la différence
entre la vie et la mort.
Ayant divisé ses forces, Osson mis son plan à exécution.
Sachant qu'aucune de ses armées ne pourrait supporter l'attention pleine
et entière du Grand Royaume, le commandant espérait détourner
Ivid d'Almor. En effet, le pays avait besoin de temps pour que des renforts
de Nyrond puissent arriver. De plus, si il pouvait suffisament harceler Ivid,
il était même possible que l'Empereur n'attaque jamais Almor. D'une
façon ou d'une autre, Osson préférait faire la guerre en
Aerdy.
Franchissant la Forêt de Thelly, Osson frappa tout d'abord au sud en Harvester
583. Rapides et profitant de l'effet de surprise, les cavaliers d'Almor balayèrent
les troupes mal entrainées d'Ahlissa et plongèrent au coeur de
la Province du Sud y semant le plus grand des désordres. Les paysans
locaux opprimés depuis longtemps par le Herzog accueillirent à
bras ouverts les Almoriens. La réponse à cette attaque fut longue
à venir, car la majorité des troupes de la Province étaient
alors massées à l'ouest se préparant à attaquer
Irongate. Dépèchant en hâte des détachements de son
armée vers l'est, le Herzog dût accepter à contre coeur
l'aide de l'Empereur. L'Armée d'Aerdy marcha donc vers le sud ouest pour
engager les intrus, mais, avant qu'elle ne les attrape, Osson poussa plus loin.
Plutôt que de retourner à Almor, Osson mena ses cavaliers dans
le Rieuwood. L'Armée des Glorioles de l'Empereur, bien que victorieuse,
avait subi de lourdes pertes durant sa conquête de Sunndi. Osson pensait
que la défaite de ses troupes dans Sunndi détournerait l'attention
d'Ivid d'Almor. Une fois dans les bois, Osson trouva toutefois les troupes de
l'Empereur prètes à le recevoir. Bien qu'affaiblie, l'Armée
des Glorioles était belle et bien là et ne serait pas être
battue si facilement. Toutefois, les aerdiens n'avaient pas un général
de génie à leur tête. A la Bataille de Rieuwood, Osson inaugura
la tactique de la fausse retraite qui allait le rendre célèbre.
Croyant la cavalerie ennemie défaite, les aerdiens lancèrent la
chasse pour finalement tomber dans un piège mortel. L'Armée des
Glorioles fut décimée.
Après un bref répis pour réorganiser ses troupes, proclamer
la libération de Sunndi et recruter des volontaires, Osson repartit de
plus bel et tranversant les Glorioles, il attaqua Nulbish sur la Rivière
Thelly. Malheureu-sement, la chance d'Osson tourna à ce moment là.
Le commandant de la garnison de Nulbish, Magistar Vlent, possédait l'entrainement
militaire qui faisait tant défaut aux autres grands d'Aerdy. Ainsi, refusant
toute confrontation directe, Magistar Vlent utilisa une flotille fluviale lourdement
armée pour soutenir la ville et harasser les almoriens. Après
quelques semaines de siège futile, Osson appris que l'Armée d'Aerdy
ne tarderait plus à le rejoindre. Tout retour vers Almor était
impossible.
Beaucoup d'options - aussi noires les unes que les autres - furent discutées
lors du conseil de guerre d'Osson qui suivit cette nouvelle
34.
Certains des chevaliers prétendaient qu'il fallait retourner à
Almor, d'autres qu'il fallait passer l'hiver à Sunndi, d'autres même
qu'ils devaient marcher sur Rauxes, la capitale du Grand Royaume. Finalement,
Osson décida de marcher sur Médegia et de maintenir la pression
sur les troupes de l'Empereur. D'autant plus que si les nouvelles se vérifiaient,
La Seigneurie des Iles et la Ligue de Fer étaient sur le point de s'allier.
La flotte des Seigneurs permettrait donc certainement à Osson et aux
siens de retourner à Almor après l'hiver, et ainsi de s'échapper
à la barbe et au nez des armées d'Ivid.
Bien que cette attaque sur Médegia surprit l'Empereur, sa réaction
fut aussi surprenante. Dès que les intentions d'Osson furent claires,
Ivid ordonna à ses armées de cesser la poursuite. Médegia
la Rebelle n'obtiendrait aucune aide. A la suite de batailles violentes, l'armée
d'Osson écrasa les forces du Saint Censeur et se rendit maitre du terrain
de Pontylver à Lone Heath. Spidasa, le Saint Censeur, fuit vers Rauxes
pour demander pardon à sa majesté impériale. Mais manquant
de compassion, Ivid le fit arrêter et condamner à la Mort Sans
Fin
35.
Aide du Sud
L'arrivée de l'hiver apporta quelque répit aux belligérants.
Dans le nord, la neige recouvrait tout et un vent glacial soufflait. Tout au
long de l'orée sud de la Vesve, les humanoïdes de Iuz, loin de la
chaleur de leurs cavernes, creusèrent des abris hâtifs du mieux
qu'ils puirent et une fois installés à l'intérieur, ils
se refusèrent à en bouger. Belvor profita de cette tranquilité
pour préparer la suite.
A l'est, la pluie eut exactement le même effet. Pris dans la boue à
cause des ordres de l'Empereur, les armées du Grand Royaume se massaient
aux frontières de Médegia, Almor et Nyrond. Le raid d'Osson et
les pluies incessantes permirent ainsi à Almor de se fortifier et de
consolider ses frontières. Nyrond également leva de nouvelles
armées afin de faire face à la menace des Aerdy.
Bien que l'hiver arrèta les armées, il semble qu'il ait donné
un coup de fouet aux efforts diplomatiques de chacun. La Marche des Os se rappela
au souvenir d'Ivid demandant sa part de butins et insista pour que l'attaque
sur Nyrond ait lieu après la fonte des neiges. Ahlissa, sentant que son
sort pouvait très bien devenir le même que celui de Médegia,
réaffirma son intention de se battre au côté d'Ivid. De
même firent les Barons des Mers, alors que la Province du Nord jurait
sa fidélité sans faille à son cher Empereur.
L'entrée de l'Empereur dans la guerre simplifia une tache de Nyrond et
d'Almor - convaincre la Ligue de Fer de se joindre à l'alliance. Ainsi,
des représentants des états membres de la Ligue, de Nyrond et
d'Almor se réunirent à Oldred sur invitation d'Archbold III et
y signèrent le Pacte de l'Est les alliant contre "les aggressions
folles du Grand Royaume". Le Comté de Urnst signa également
ce pacte mais la Théocratie de Pale s'y refusa citant les nombreuses
hérésies de Nyrond.
Toutefois, cette alliance pris un sérieux coup quand le Prince Latmac
Ranold de la Seigneurie des Iles fut déposé par un de ses cousins
éloignés, le Prince Frolmar Ingerskatti qui proclama son allégeance
au Grand Empire Caché de la Confrérie Ecarlate. Osson était
pris au piège à Médegia et la Confrérie Ecarlate
devenait une réalité tangible.
A l'ouest, les efforts diplomatiques de Furyondy portèrent enfin leurs
fruits. Réalisant que la menace de Iuz était bien plus que réelle,
les états du sud consentirent enfin à s'allier. Kéoland
signa en premier le Traité de Niole Dra, suivi de près par Gran
March, le Yeo-manry, le Duché d'Ulek et le Comté d'Ulek. Célène
fut le dernier des pays à y consentir. Citant des menaces frontalières,
les autres pays du sud s'y refusèrent mais jurèrent toutefois
de ne pas aider Iuz. Avec ce traité en main, Belvor revint donc à
Chendl avec beaucoup d'espoir pour son peuple.
A sa façon, Iuz conclut aussi des alliances - toutes outrageusement à
son avantage. Après que le Royaumes Bandits aient été définitive-ment
annexés, il envoya des émissaires à Ket, Tusmit et Perrenland
leur demandant de prendre les armes. Ket et Tusmit répondirent favorablement
alors que Perrenland ne lui offrit que sa neutralité bienveillante et
des mercenaires. D'autres de ses agents allèrent encore jusque dans les
Monts de Cristal espérant inciter les humanoïdes y résidant
à attaquer Kéoland et ses alliés.
Finalement quand le printemps arriva, de nouvelles armées étaient
en marche. La majorité des troupes de Kéoland franchissait les
Lortmils, une petite troupe de Gran March arrivait par les Lorridges, quelques
elfes de Célène montaient au nord, et la Ligue de Fer se rassemblait
à Idee et Irongate. Parmi les forces du mal, Ket était près
à fondre sur Bissel, la Marche des Os menaçait Ratik et Nyrond,
et les Barons et Seigneurs des Mers se précipitaient vers la baie de
Grendep pour faire cesser les raids des barbares.
Un Empire où nul n'existait
Pendant que ces armées fraiches marchaient vers le nord, des évènements
très importants se déroulaient au Pomarj. Faisant autrefois partie
de l'Empire de Kéoland, cette terre de montagnes et forêts était
tombée depuis longtemps aux mains de sauvages tribus humanoïdes.
La Principauté d'Ulek fit de nombreux essais pour conquérir cette
région mais rien ne parvint à briser la résistance farouche
des gobelins et orques qui y avaient trouvé refuge. Le Pomarj acquit
rapidement la réputation d'un endroit de mort, d'esclavage, de dégénérescence
et de fortune. Aussi, peu de gens osaient braver ces terres sauvages, si bien
que ni Célène ni les pays d'Ulek ne virent ce qui s'y tramait.
Une révolution venait de se produire, une de celle que personne n'aurait
pu soupçonner : un chef demi-orque venait de s'y révéler.
Après s'être proclamé le chef du peuple des Nedla, Turosh
Mak prit le contrôle des tribus avoisinantes 36. Se déclarant Despote,
Turrosh Mak commença à rassembler les diverses tribus en une grande
confédération, et réussit ce qui aurait pu sembler invraisemblable
pour tout le monde.
Pour avoir cette emprise sur les divers orques, gobelins, gnolls, ogres et autres,
Turrosh Mak leur remémora les Guerres de la Haine dont la douloureuse
mémoire circulait toujours dans leurs têtes. Ainsi, il n'eut pas
grand chose à faire pour les rallier dans un même et unique but
: recouvrer leurs territoires ancestraux.
Par le plus grand des hazards, Turrosh Mak frappa au moment le plus opportun
pour lui et ses troupes. De grandes armées venaient juste de quitter
les terres du sud pour aller combattre dans le nord emmenant avec elles les
meilleurs hommes et les officiers les plus capables. Pendant que les autres
nations regardaient au nord, la nouvelle nation orque avait du temps pour grossir
et s'organiser.
Clamant haut et fort qu'il "forgerait un empire où nul n'existait",
Turrosh Mak lanca ses troupes sanguinaires à la fin du mois de Readying.
Cherchant tout d'abord des victoires faciles, il marcha sur le Sud de la Côte
Sauvage qui tomba rapidement avec Elredd, Badwall et Fax. Grisées par
la victoire, les tribus se dirigèrent ensuite vers le sud ouest et entrèrent
dans la redoutable forêt de Suss puis firent éruption dans la Principauté
d'Ulek.
Comme il est souligné plus haut, l'attaque eut lieu au bon moment. En
effet, la majorité des armées qui auraient pu aider la Principauté
dans sa lutte étaient au nord. Ainsi, la petite armée d'Ulek,
bien qu'agguérie, fut prise de court par les hordes déferlantes
du Pomarj et vite débordée. Le nain Marshall de la Jewel, Augustos
Clinkerfire, combattit de son mieux mais ne put qu'organiser une retraite en
bon ordre devant le nombre d'assaillants. Finalement, c'est dans les basses
collines des Lortmils où les nains étaient plus à leur
avantage, que le Seigneur Clinkerfire réussit à stopper l'avancée
du Pomarj. Malheureu-sement, la moitié est de la Principauté était
tombée aux mains de Turrosh Mak.
Sachant la fragilité de sa confédération tribale, le Despote
n'insista pas plus loin. Ses orques avaient besoin de victoire pour maintenir
leur enthousiasme et il était décidé à ne pas s'enliser
dans un conflit qui serait long et sans issue. Satisfait de ses gains, Turrosh
laissa ses contingents humains en Ulek et mena ses armées orques vers
le nord
37. Longeant la Forêt de Suss, Turrosh
mena ses armées au nord ouest vers les cimes des Lortmils.
Sur leur chemin, gnômes, hobbits et nains combattirent courageusement
mais surpris par un tel déploiement de forces, ils cédèrent.
Ainsi, les orques s'enfoncèrent dans les montagnes sans trop rencontrer
de résistance jusqu'à la Passe de Célène où
une coalition de réservistes humains, nains, gnomes, hobbits et elfes
mit une halte à leur avancée.
La Bataille de la Passe de Célène fut sanglante et longue. Les
éclaireurs avancés de la Ligue du Droit (comme les défenseurs
se nommèrent) venaient juste d'atteindre un virage de la passe quand
ils virent les premiers scouts orques. Sur ordre du nain Rourk Splinder, les
quelques 200 éclaireurs de la troupe montèrent une barricade de
fortune et une redoute sur le bord de la passe avant que le gros des orques
n'arrive. Réalisant qu'ils étaient inférieurs en nombre,
Slinderstone envoya de nuit des messagers vers Célène et Ulek.
Les orques étaient dans la passe et ceux-ci risquaient gros. Mais qu'en
était-il de ceux qui restaient ? Si les messagers étaient tués
ou arrivaient trop tard, Splinterstone et ses hommes ne pourraient rien faire
d'autre que combattre jusqu'au dernier.
La première attaque eut lieu de nuit, une tactique orque standard. L'assaut
n'était rien d'autre qu'une charge sauvage, une tentative de débordement
par la masse. Toutefois, la barricade tint grâce aux ordres et au sang
froid de Splinterstone. Des vagues d'orques chargèrent au fil des heures
et ne cessèrent qu'à l'aube. Le soleil du matin éclairait
un spectacle étonnant et horrifiant : d'innombrables corps d'orques étaient
avachis devant la barricade comme pour la renforcer. Bien que moins nombreuses,
les pertes naines étaient sérieuses. Toutefois, malgré
le besoin qu'avaient ses hommes de se reposer, Splinterstone ordonna la construction
d'une seconde et d'une troisième barricade au cas où la première
tomberait la nuit suivante.
Pendant les trois jours qui suivirent, les Défenseurs du Droit, protégés
par leurs "fortifications", résistèrent tant bien que mal aux
incessantes vagues d'orques et de gobelins qui venaient se fracasser sur leurs
défenses. Quand une colonne de renforts venant d'Ulek arriva enfin sur
les lieux
38, elle fut bien étonnée
de constater que Splinterstone et 30 de ses hommes étaient encore vivants
et tenaient tenacement la dernière barricade. En effet, tous les croyaient
morts depuis longtemps. Rourk Splinterstone reçut une baronie pour son
courage et ses hommes se virent allouer une pension pour le reste de leur vie.
La défense de Rourk avait stoppé l'avance orque et une fois de
plus le Despote du Pomarj cessa ses attaques, cette fois-ci pour retourner au
Pomarj s'occuper de chefs orques rebelles. D'autres conquêtes attendraient.
Turrosh Mak arrêté, les états d'Ulek se préparaient
à contre-attaquer mais même unies leurs armées étaient
trop faibles. En effet, bien que l'engagement de Célène dans cette
force aurait pu leur assurer la victoire, les elfes n'avaient aucune intention
de leur prêter assistance.
Peu confiante envers ses voisins, Sa Majesté Yolande ne voulait pas bouger.
A son sens, les humains du nord avaient "exigé" son aide et l'avaient
ainsi privée de troupes vitales à la sécurité de
son propre pays. Maintenant, des nains et des gnômes - nullement amis
des elfes - demandaient son aide dans les montagnes. Aucun pays ne lui avait
offert son aide quand Célène était menacé par le
Pomarj raisonnait-elle. Donc, personne n'aurait d'aide de Célène.
Yolande rappella ses troupes de Furyondy et ferma ses frontières. D'autres
avaient déclenché cette guerre, ils la résoudraient eux
même et aucun elfe ne serait tué inutilement.
La conquête d'Almor
Comme les derniers nuages de l'hiver se dissipèrent dans l'est, le Commandant
Osson, toujours prisonnier de Médegia, pouvait bien imaginé le
sort qui l'attendait avec ses hommes. L'espoir qu'il avait placé dans
la Seigneurie des Iles s'était effondré. Des navires des Barons
des Mers - les Requins d'Ivid - patrouillaient la Mer d'Aerdy pendant que les
armées du Grand Royaume l'attendaient aux frontières. Même
les paysans de Médegia que Osson pensait voir se soulever ne voulaient
rien savoir par peur des légions d'Ivid. Ainsi, sachant que sa fin était
proche, la cavalerie d'Almor repartit sur le chemin de la guerre pour la dernière
fois, tentant une percée sur la Rivière Flanmi pour atteindre
les Hautes Terres d'Hestmark.
Bien qu'Osson ait préparé une attaque en bon ordre, l'assaut fut
plutôt désordonné. En effet, alors que la cavalerie chargeait
à travers la rivière, nombre de ses officiers tombèrent
sous les flèches des aerdiens retranchés. En fait, tant moururent
que l'armée n'était quasiment plus commandée. Ainsi, dès
qu'il le pouvait tout cavalier tentait sa chance et filait comme il le pouvait
vers les plateaux et la sécurité de Sunndi. De là, le reste
de la cavalerie défaite retourna à Almor par la Ligue de Fer.
Le Commandant Osson ne revint pas et son devenir reste encore un mystère.
Le Grand Raid Almorien venait finalement de se terminer.
Ce ne fut qu'après que ses diables se soient rassasiés des cadavres
que l'Empereur s'occupa de Médegia. Ivid ordonna que cette terre soit
pillée et défigurée. Il voulait que chaque homme, femme
et enfant souffre pour avoir manqué d'obéissance. Le châtiment
éternel de Spidasa ne suffisait pas à apaiser sa colère.
Ivid autorisa tout homme à piller, violer, massacrer. Certains chefs
allèrent même jusqu'à livrer bataille pour avoir le droit
de piller telle ou telle ville. De fait, l'armée d'Ivid fut occupée
pendant quelque temps.
Le Raid d'Osson avait fait beaucoup pour Almor. L'Armée des Glorioles
était détruite, et l'Armée d'Aerdy était loin. Ainsi,
la Prélature avait le temps de lever des armées et de se fortifier.
Malgré ceci, la résistance d'Almor fut futile car Ivid - avec
Ahlissa, Médegia (ce qu'il en restait), la Province du Nord et la Marche
des Os à ses côtés - lacha toutes ses forces sur la pauvre
Prélature.
Les historiens hésitent à nommer l'invasion d'Almor une bataille.
Ce fut plus exactement un massacre. Les armées d'Ahlissa et d'Aerdy convergaient
sur Chathold du sud et de l'est; celle du Nord marchait à travers la
Forêt d'Adri pour prendre la frontière entre Almor et Nyrond pendant
que les orques de la Marche fondaient sur le flanc est de Nyrond. Ivid déborda
donc Almor par trois fronts et empêcha Nyrond d'aider la Prélature.
Ironiquement, Almor fut attaqué et tomba en Planting 584. En effet, Chathold
ne sut résister à la folie destructrice des mages et prêtres
de l'Empereur. En un seul jour, le Jour de Poussière, ceux-ci réduisirent
Chathold en cendres à force de magie. Quand la poussière tomba,
il ne restait rien de Chathold à piller. Toutefois, Ivid ordonna que
le corps de Kevont soit retrouvé et exposé pendant un mois sur
les restes des murs de la ville. La nation d'Almor n'existait plus.
Les Cavaliers de Ket
Pendant ce temps, dans l'ouest, Iuz était confronté à une
coalition d'armées bonnes. Furyondy, Veluna, Gran March, les états
d'Ulek (qui ne savaient pas à propos du Pomarj), Keoland et le Yeomanry
unissaient leurs bannières contre le Seigneur du Mal. Avec la Société
Cornue et Stonefist comme seuls alliés actifs, Iuz semblait condamné.
Toutefois, la diplomacie de Iuz porta finalement ses fruits. En effet, au début
de Goodmonth, les gardes de Bissel le long de la Rivière Fals virent
les premières bannières du nouvel allié d'Iuz, Ket dont
ils tinrent les troupes à distance respectable pendant quelques semaines.
Veluna retira rapidement ses troupes de Furyondy craignant que les cavaliers
ne changent d'objectif. Au même moment, des nouvelles de l'attaque du
Pomarj arrivèrent aux commandants d'Ulek à Furyondy. Pris entre
leurs promesses à Belvor et les besoins de leurs nations, le Duc d'Ulek
- Suprême Commandeur des forces d'Ulek - divisa ses troupes et en renvoya
la moitié dans le sud, laissant l'autre à Furyondy.
Parmi les revers du destin, c'est à ce moment là que les géants,
ogres et autres descendirent des Monts de Cristal sur les vallées de
Stérich et de Geoff. Les dirigeants de ces terres envoyèrent alors
des appels désespérés au roi Skotti de Kéoland,
mais la majorité de l'armée de celui-ci étant dans le nord,
il n'avait que peu d'aide à offrir car ses réserves aidaient déjà
les Etats d'Ulek. Néanmoins, Skotti rassembla les forces qu'il put et
les offrit au Comte de Stérich après que celui-ci ait reconnu
l'authorité de Kéoland. Ces négociations prirent du temps
et ce fut trop tard pour Stérich et Geoff.
Le Yeomanry fut lui aussi attaqué mais il tint. En effet, les paysans
de ce petit pays savaient comment contrer ces êtres qui les menaçaient
depuis longtemps. Toutefois, le Trouble des Géants les empêcha
d'envoyer plus de troupes vers Furyondy.
Iuz profita de la diversion fournie par ces évènements et l'invasion
du Pomarj pour lancer une nouvelle vague d'attaques. Tout d'abord, il poussa
sur Chendl, mais ses armées furent repoussées et marchèrent
à l'est de Crockport pendant que la Société Cornue faisait
le siège de Grabford. Assaillies de toutes parts, les forces de Furyondy
refluèrent et Iuz pris les berges sud du Lac Whyestil. La flotte de Whyestil
qui avait assuré la domination de Furyondy sur ces eaux s'échappa
de justesse de cet étau et rejoignit le Nyr Dyv par la Veng.
Toutefois, les forces du mal subirent aussi une cruelle défaite. Pendant
que Iuz marchait à l'est, Belvor contre attaqua dans la Vesve. Aidé
par les elfes des bois et les rangers de Highvale, il décima systématiquement
tous les anciens territoire tribaux des orques dans ces bois. Avec la destruction
de ces tribus, Belvor élimina tout espoir de Iuz de pouvoir se renforcer.
Pendant ce temps, Veluna stoppait net la marche des Ketites sur Mitrik.
Bissel n'eut pas cette chance. Finalement, les cavaliers bakluns brisèrent
ses frontières. Ainsi, le Beygraf Zoltan, Bouclier de la Vraie Foi, forca
le Marshall de Bissel à accepter ses termes de rédition. La paix
conclue, Ket contrôlait les routes commerciales vitales à travers
le Trou de Bramblewood.
Le Roi Fou part en Campagne
La vague du mal semblait devoir submerger la Flanesse mais Istus fit son apparition
sous les traits d'Ivid le Dément. Après avoir considéré
le succès de l'éviction d'Osson et de la Campagne d'Almor dans
lesquelles il avait joué un rôle modeste, Ivid conclut qu'Osson
n'était pas un bon commandant mais plutôt que ses propres généraux
étaient des ignares incompétents
39
qui avaient besoin de son aide. En bref, il décidait qu'il était
un génie militaire et que ses généraux étaient des
crétins attardés.
Après cette soudaine prise de conscience, Ivid prit personellement le
contrôle de toutes les armées du Grand Royaume malgré les
conseils de ses meilleurs aides. Ivid ne dessaisit pas uniquement ses généraux,
il en exécuta bon nombre n'épargnant que ses favoris.
La campagne militaire qui s'ensuivit fut, comme c'était prévisible,
un véritable désastre. Encouragé par la victoire sur Almor,
Ivid poussa ses armées sans commandemant vers Nyrond croyant qu'il pourrait
les diriger du Trône de Malachite par magie et messagers interposés.
La tentative de passer la Rivière Harpe près d'Innspa fut un désastre
total car les quelques commandants qui avaient échappés à
la colère d'Ivid eurent trop peur de critiquer même le plus petit
détail tactique. De plus, les ordres de Rauxes mettaient des heures à
arriver et quand ils arrivaient, ils étaient illogiques ou dépassaient
clairement les développements de la bataille.
Ivid répondit à ces fautes par d'autres exécutions et la
peur commença à s'installer au coeur de la noblesse : la mort
d'un commandant menait à la désignation d'un noble "sûr",
qui était alors mis dans une situation impossible et devenait le prochain
candidat à l'exécution. Originellement un honneur, les prises
de commandements signifiaient la mort. Les généraux apprirent
rapidement que la meilleure façon de survivre était de ne rien
faire. Toute attaque sur Nyrond n'alla pas plus loin que la frontière,
mais les armées du Grand Royaume continuaient leurs assauts futiles suivant
aveuglement les ordres de l'Empereur.
Toutefois, Ivid ne s'arrèta pas là. Pensant - à juste titre
- que ses généraux conspiraient contre lui, il décida d'avoir
encore plus la main mise sur ceux-ci. Les prêtres d'Hextor, cherchant
à se racheter aux yeux de l'Empereur, trouvèrent une solution
à ce problème
40. Grâce à
des rituels secrets, les prêtres ramenèrent les généraux
morts sous forme d'
animus - un être qui, bien que mort, garde son
intelligence et ses aptitudes. Ivid pensait probablement que de telles créatures
lui obéiraient plus facilement. En fait, il fut tellement impressionné
par ces généraux animus qu'il étendit ses ambitions. Tout
d'abord, il fit tuer tous les nobles qui lui avaient déplu ou qui allaient
le faire et les fit devenir des animus ainsi que tous ses courtisans favoris.
Bien que les nobles d'Aerdy étaient décadents, ils n'étaient
pas fous et considéraient la "récompense d'Ivid" comme très
peu enviable. Les faveurs d'Ivid devenant aussi mortelles que sa colère,
nombre de nobles sombrèrent dans la médiocrité la plus
totale et l'anonymat, voir la clandestinité. Quelques uns des plus courageux
tentèrent de le dissuader, mais ne réussirent qu'à être
"récompensés" sur le champ. Ainsi, dans la noblesse, la peur d'Ivid
se transforma peu à peu en défiance. En bref, Ivid créa
par son attitude les complots qu'il imaginait.
Cette crise de la noblesse d'Aerdy attint son paroxisme lors du Festival des
Richesses 584. Un assassin sortit de la foule et porta un coup fatal à
Ivid avec une dague empoisonnée
41. Quand
la mort d'Ivid fut annoncée, tout le pays poussa un soupir de soulagement.
Et les nobles se préparèrent joyeusement à la lutte pour
le pouvoir qui allait avoir lieu.
Cependant, celle-ci n'eut pas lieu à cause d'un évènement
encore plus important que la mort même d'Ivid. Des arrangement secrets,
probablement passés avec des diables alors qu'il était sur le
Trône de Malachite, firent qu'Ivid revint de la mort. Ivid V, qui était
sans âme et glacial durant sa vie, l'était doublement dans sa mort.
La vengeance de l'animus Ivid fut rapide et terrible. Une orgie d'exécution
et de revivification s'ensuivit. Ivid récompensait même la plus
petite suspiscion par la mort. Cherchant à règler leurs comptes,
les nobles impliquaient leurs ennemis, et Ivid se moquait bien de savoir si
les accusations portées étaient vérifiées ou non.
L'Empereur, maintenant surnommé l'Immortel, se divertissait dans le chaos
et la destruction de ses terres.
Ayant eu vent des massacres perpétrés par Ivid, le roi Archold
III de Nyrond contre attaqua l'Armée du Nord entre Womtham et Innspa.
Bien que les généraux animus d'Ivid combattirent bien - étant
morts, ils n'avaient pas peur de mourir - les terres meurtries du Grand Royaume
ne leur offrirent aucune aide.
Sa Grace Grenell, Herzog de la Province du Nord, se rebella contre son cousin
dans une tentative désespérée de stopper la marche des
Nyrondais sur ses terres. Libéré du roi fou, il s'allia à
la Marche des Os, et réussit à stopper l'avance d'Archbold aux
Collines de Silex en sacrifiant sans pitié de nombreuses troupes humaines
et orques. Malgré cette leçon, Archbold ne lacha pas prise et
continua son attaque croyant que la victoire totale était à sa
portée.
La défection de la Province du Nord donna du baume au coeur à
de nombreux autres nobles, vivants ou animus. Le Herzog de la Province du Sud,
parmi les premiers nobles à avoir été récompensé
par Ivid, réaffirma sa domination sur la Province du Sud. D'autres l'imitèrent
rapidement et transformèrent leurs domaines en camps armés. L'autorité
de l'Empereur s'effondra alors entièrement, ne le laissant à Ivid
que ses propres terres. Ainsi, le fragile Grand Royaume éclata en des
centaines de petites principautés, de duchés, de baronies et autres
comtés. L'Empire d'Aerdy n'existait plus.
La Confrérie Ecarlate frappe
Durant la première année de la guerre, une faction était
restée notablement silencieuse - la Confrérie Ecarlate. Pendant
que d'autres se battaient à grands coups d'armées, la Confrérie
infiltrait insidieusement toute les cours des rois. En guise d'armées,
le Père de l'Obéissance envoyait des agents. Bien que la Confrérie
semblait un simple observateur, rien n'était plus loin de la vérité.
La première phase du plan de la Confrérie Ecarlate était
simple - attendre et voir. Le Père de l'Obéissance passa les premiers
mois de la guerre à déterminer qui attaquerait qui et où
les véritables centres d'intérêt se situaient. Tant que
la guerre se limitait au nord, le Père de l'Obéissance se contenta
des rapports que ses agents lui envoyaient de chaque camp. Ces hommes, se faisant
passer pour des érudits ou des sages depuis bien avant le début
des hostilités, conseillaient seigneurs et commandants imprimant ainsi
la marque invisible de la Confrérie dans toutes batailles. Ces espions
travaillaient pour s'assurer que les hostilités continueraient et que
personne ne gagnerait. Le Père de l'Obéissance voulait que la
guerre continue et c'est ce qui se passa.
Un autre groupe d'agents de la Confrérie travaillait plus loin dans des
contrées plus isolées et désolées. Là bas,
ils rencontrèrent d'inquiétantes créatures et leur murmurèrent
de se soulever et de conquérir la terre des humains. Des Monts de Cristal
jusqu'aux Marais des Trolls, elles répondirent. Ainsi, à la manière
de la lune, silencieusement et inexorablement, le Père de l'Obéissance
levait la marée du mal.
Quand le Grand Royaume se réveilla, la Confrérie passa à
la deuxième phase de son plan : faire pencher la balance en leur faveur.
Son dirigeant considérait l'alliance avec certains pays comme vitale.
Avant tout, il y avait la Ligue de Fer qu'il ne voulait voir ni prospérer
ni mourir. Tant que ces états restaient comme ils étaient, ils
constituaient un tampon idéal entre la confrérie et le Grand Royaume.
Bien qu'il égalait Ivid dans le mal, le Père de l'Obéissance
n'appréciait pas du tout l'Empereur.
Grâce à sa position ambivalante dans les plans de la Confrérie,
la Ligue d'Acier reçut des aides et des freins étranges durant
la guerre. Ainsi, Irongate, menacée par les armées de la Province
du Sud, reçut des équipements, de l'argent, des conseillers et
des mercenaires tous évidement de sources diverses. En vérité,
la Confrérie contrôlait tout dans la cité et, ne se doutant
visiblement pas de leur véritable provenance, Cobb Darg, Grand Seigneur
Maire d'Irongate, en faisait bon usage. Le maire, un homme capable et énergique
possédant un sens inné de la tactique, utilisa ces ressources
pour battre à plate couture à plusieurs reprises la Grande Armée
du Sud bien que son armée fut largement dépassée par le
nombre. Cobb Darg, aidé de ses conseillers, fit une utilisation judicieuse
de pièges, de fortifications et de magie et mena plus d'une des armées
d'Ahlissa à leur perte.
Pendant qu'elle défendait Irongate et donc Onnwal, la Confrérie
travaillait ailleurs pour détruire l'unité de la Ligue d'Acier.
Sachant que le Grand Marais bloquerait toute attaque terrestre, le Père
de l'Obéissance ne leva pas le petit doigt quand Osson libéra
Sunndi. Sous la direction d'Ivid, les cours du pays étaient peu sensibles
aux conseillers de la Confrérie, mais libérées elles les
accueilleraient certainement avec joie - du moins pendant quelque temps.
Une autre partie de la Ligue de Fer avait un intérêt tout particulier
pour la Confrérie - la Seigneurie des Iles. Les plans du Père
de l'Obéissance nécessitait qu'il contrôle les mers du sud,
il était donc vital de capturer une flotte. Ainsi, les agents de la Confrérie
corrompurent un cousin lointain du prince reignant et se débrouillèrent
pour déposer le Prince Latmac Ranold. Une fois que leur marionnette,
le Prince Frolmar Ingerskatti, était au pouvoir, la Confrérie
signa un contrat avec lui et pris le contrôle de la seigneurie. Sur ordre
du Père Suprème, Ingerskatti plaça des agents de la Confrérie
à des points vitaux du pays. Rapidement, les prêtres du Signe Ecarlate
établirent des temples et préchèrent. La noblesse fut abolie.
En bref, la Confrérie Ecarlate modela rapidement ces terres à
son image.
La Ligue de Fer sous son contrôle et le Grand Royaume sur le point de
s'écrouler
42, le Père de l'Obéissance
passa alors à la troisième phase de son plan. Un ambassadeur encapuchonné
de rouge arriva à la cours des Princes des Mers avec un ultimatum : "Soumettez
vous à la Confrérie Ecarlate ou soyez détruits." Quand
les seigneurs de ces terres se moquèrent de lui, il leur présenta
une liste de 30 noms de nobles. Avant le lendemain, 27 de ceux-ci étaient
morts. Seulement trois avaient survécu aux assassins écarlates
dont deux grièvement blessés. Les princes cessèrent vite
de rirent et se rendirent rapidement. Le lendemain, des vaisseaux battant pavillon
écarlate accostaient à Monmurg et Port Toli débarquant
d'étranges guerriers venus des jungles du sud.
Sa flotte aggrandie et forte de ses nouvelles troupes, la Confrérie frappa
vite et fort. Idee et Onnwal tombèrent d'un coup, défaits par
des traitrises internes et les armées de sauvages. Irongate se montra
beaucoup plus tenace. Malgré les apparences, Cobb Darg connaissait l'origine
exacte de l'aide qu'il avait reçu et avait utilisé cette connaissance
à son avantage. Juste avant que les armées de la Confrérie
n'arrivent, Darg expulsa ou exécuta tous les agents qu'il put trouver.
Quand les armées arrivèrent, il les reçut à sa façon,
avec énergie et talent. Ainsi, Irongate résista à l'assaut
et demeura le seul bastion de liberté dans la Ligue de Fer.
A l'ouest, la Confrérie faisait le blocus de Gradsul car la flotte de
Kéoland empêchait tout débarquement. Pendant ce temps, les
armées de sauvages s'infiltraient dans les Marais de Hool et dans le
Dreadwood. Là, une grande coalition d'elfes de Kéoland leur opposa
une redoutable résistance et les força à stopper leur marche.
Bien que les défenseurs tenaient, des renforts incessant arrivaient des
jungles et forçaient Kéoland à serrer les rangs.
Contrairement à toutes les autres nations impliquées dans la guerre,
la Confrérie Ecarlate ne tenta pas de gagner plus qu'elle n'avait déjà
acquis. Voyant le long terme, le Père de l'Obéissance cessa rapidement
toute hostilité ouverte préférant se concentrer sur l'adminis-tration
de ses nouveaux territoires. Des agents de la Confrérie remplacèrent
les officiels clé, des prêtres ouvrirent des temples et des lois
établissant le pouvoir absolu de la Confrérie furent lentement
mises en vigueur.
La Fin de la Guerre
Pendant de longues années
(582-584 AC), les nations de la Flanesse avaient comploté, tué,
massacré jusqu'à ce que toutes soient à genoux. La guerre
avait épuisé la terre et les hommes. Furyondy et Iuz en étaient
arrivé à une impasse; les ressources de Nyrond étaient
épuisés et ses paysans croulaient sous les taxes faisant monter
un vent de révolte; le Grand Royaume s'était effondré et
ses anciens nobles en venaient à se battre les uns avec les autres; Keoland
combattait des invasions de toutes parts; nombre d'hommes, de nains, d'elfes,
et d'orques étaient partis pour ne jamais revenir; les fermes étaient
vides, les champs dévastés ... La guerre devait cesser.
Les propositions de trève devinrent de plus en plus raisonnables. Les hommes
de la Confrérie Ecarlate, sur ordre du Père de l'Obéissance,
clamèrent à tous qu'il était temps de cesser les hostilités
43 et que chaque nation se réorganise.
Finalement, la trève proposée par la Confrérie fut acceptée
de tous après d'âpres négociations, des intimidations de toutes
sortes, et même quelques assassinats
44. La
Cité de Greyhawk qui fut épargnée par la guerre devint le
site de la conférence 45. C'est en Harvester, que le Grand Conseil se réunit.
La paix, bien que simple en théorie, s'avéra être un véritable
casse tête pour les nombreux ambassadeurs présents à Greyhawk.
Durant les six mois que dura le Grand Conseil, les intrigues de tout style abondèrent
comme chacun essayait d'obtenir de concessions favorables. La conférence
fut presque annulée de nombreuses fois à cause des ombrages subits
par certains, réels ou imaginaires.
Finalement, le Jour de la Grande Signature arriva et presque toutes les nations
étaient tombées d'accord. C'est alors que cet évènement
important allait avoir lieu que l'irréparable se produisit.
Même actuellement, on ne sait pas encore exactement comment, mais quelqu'un
tenta apparement de tuer toute la délégation présente à
la cérémonie. Une immense explosion détruisit une bonne partie
du Grand Hall de Greyhawk quelques instants seulement avant que les invités
n'arrivent dans les lieux. Il s'ensuivit une terrible bataille magique au travers
de la vieille ville. Quand tout redevint calme, les gardes découvrirent
les corps calcinés de deux puissants membres du mystérieux Cercle
des Huit - Otiluke et Tenser. Le meurtrier de ceux-ci s'avéra être
Rary, lui aussi membre de cette organisation. Toutefois, celui-ci semblait avoir
prémédité son coup car tous les clones existants des deux
mages furent également détruits rendant leur mort irrémédiable.
Les motivations de Rary sont incertaines. D'après ceux qui le connaissait
bien, il aurait voulu profiter de cette occasion - la signature de la paix - pour
prendre le pouvoir dans le chaos qui aurait suivi la mort de tant de dirigeants
de tant de pays divers. D'autres prétendent que Rary était un agent
de la Confrérie Ecarlate.
Démasqués, Rary et son complice, le Seigneur Robilar, fuirent
la cité et trouvèrent refuge dans les profondeurs du Désert
Brilliant. Là bas, ils dominèrent les nomades et établirent
leur royaume. Bien que petit et mystérieux, ce petit état
pourrait bien un jour menacer la cité de Greyhawk. Malgré
cet évènement, la paix fut signée rapidement entre
les diverses parties. Ainsi nacquit le Pacte de Greyhawk qui mettait fin
à trois années de guerres que l'on nomme encore à
tord les Guerres de Greyhawk.